Les leçons de Katherine : 3 – l’évaluation annuelle

évaluation annuelle

Note : Avant de lire ce texte, prenez le temps de lire les leçons 1 (l’avis écrit) et 2 (le projet d’apprentissage). Vous y trouverez des informations importantes sur votre droit de faire l’école à la maison.

Après avoir envoyé l’avis écrit relatif à l’enseignement à la maison ainsi que votre projet d’apprentissage, vous vous interrogez peut-être sur les différentes modalités qui s’offrent à vous concernant l’évaluation de fin d’année.

Dans votre projet d’apprentissage, vous avez indiqué la méthode d’évaluation de la progression de votre enfant que vous songez utiliser en fin d’année. Dans le contexte de l’école à la maison, nul besoin de passer des examens pour que l’enfant puisse atteindre le niveau scolaire suivant. Le travail aux côtés de l’enfant pendant toute l’année permet en général de bien percevoir ce qui est compris et ce qui ne l’est pas.

Cependant, le ministère demande une évaluation annuelle afin d’avoir une preuve que l’enfant reçoit un minimum requis. Sachez qu’il y a d’autres façons que les examens pour y arriver.

Je ne vous décortiquerai pas les cinq méthodes d’évaluation possibles, car elles sont très bien expliquées sur cette page de l’AQED. On y décrit, entre autres, les coûts à prévoir ou non selon notre choix. Mais au-delà des critères factuels, un choix est-il meilleur qu’un autre?

Pistes de réflexion

Examens à l’école

Les examens à l’école pourraient obliger l’enfant à suivre de plus près le programme scolaire du ministère, voire suivre la PDA (progression des apprentissages), que ce qui est nécessaire. De plus, l’utilisation des mêmes cahiers que l’école serait fortement recommandée pour avoir sensiblement le même vocabulaire et ainsi avoir plus de chances de réussir les épreuves. Cela n’a pas un statut obligatoire et ne garantit pas la passation, mais facilite la compréhension du fonctionnement de l’examen pour en permettre une meilleure réussite.

Les enfants qui fréquentent l’école reçoivent une préparation aux examens de fin d’année. Les enseignants font leurs propres examens ou ont accès aux examens du ministère à l’avance et préparent les élèves en fonction de la tournure des questions. Les élèves pratiquent aussi les techniques efficaces pour de tels examens toute l’année. Dans le contexte de l’école à la maison, nous n’utilisons pas nécessairement les mêmes techniques de résolution de problèmes ou le même vocabulaire précis pour l’application des notions. Nous sommes des parents qui accompagnons nos enfants avec nos mots et nos activités du quotidien. Cela ne veut pas dire que nos enfants n’acquièrent pas la matière, mais qu’ils l’acquièrent dans des circonstances différentes, avec des mots différents. De petits détails qui peuvent rendre l’enfant stressé de ne pas comprendre le vocabulaire propre à l’examen alors qu’il maîtrise la matière; ce qui pourrait mener à une correction difficilement équitable et possiblement à l’échec des examens. Il est possible pour l’enfant de participer en classe à ces préparations, mais cela est compliqué à arranger avec les écoles et demande de passer possiblement deux à trois semaines en classe à la fin de l’année.

Les conditions de passation des examens peuvent être source d’anxiété pour les enfants d’école-maison. Ils n’ont pas toujours accès à des salles vides où ils travaillent sans bruit et se concentrent facilement. Ils peuvent être jumelés à des élèves inconnus, avec des bruits inhabituels (à la maison, il n’y a pas 25 enfants qui se mouchent, aiguisent leur crayon, échappent une feuille, posent une question, claquent la langue… il peut y avoir une petite sœur qui chante Frozen à tue-tête, mais ça, c’est normal). Un nouveau milieu, une nouvelle odeur, une ambiance de stress (car même pour les enfants qui fréquentent l’école, les examens sont anxiogènes), plein de raisons qui pourraient nuire à la réussite de nos enfants.

On pourrait croire que ce sont des excuses, car nous avons peur de faire passer ces examens à nos enfants et qu’ils échouent. Mais ce n’est pas le cas ou, en tout cas, seulement en partie. L’école-maison est un mode de vie en soi. Je sais tout ce que mon enfant a appris depuis qu’il est né, je sais comment il l’a appris et je sais, parce qu’il me l’a raconté, comment il l’a intégré. Je n’ai pas besoin d’un examen dans des conditions artificielles pour me le prouver. Un échec dans ces conditions artificielles pourrait nuire à l’estime de soi de nos jeunes alors qu’ils ont progressé suffisamment et acquis la matière de manière satisfaisante.

Les études en évaluation d’apprentissage sont assez révélatrices que les examens de fin d’année, de la façon dont ils sont administrés présentement, où il faut assimiler la matière et la rendre sur une feuille d’un coup en l’oubliant par la suite, ne correspond pas à une façon efficace d’évaluer l’intégration de la matière. Quand on a une classe de 25 élèves, c’est une méthode d’évaluation facile à utiliser pour vérifier la rétention de la matière sur un groupe. Toutefois, dans l’absolu, ce n’est pas une manière efficace et adéquate de le faire. C’est une photo statique, ponctuelle d’un apprentissage riche qui, si elle est prise à un mauvais moment (rhume, allergie, menstruations, mauvaise nuit, etc.) peut mener à un échec. Alors pour nos enfants d’école-maison, pour qui on choisit une façon alternative d’apprendre, nous préférons souvent choisir une façon alternative d’évaluer.

Portfolio

Le portfolio est une méthode alternative intéressante. Elle permet à l’enfant de feuilleter un cartable de souvenirs de son année scolaire. D’une année à l’autre, il peut revoir sa progression, l’évolution de sa calligraphie, sa capacité à surmonter des difficultés, etc. C’est son livre de vie de l’année. Il est encore plus profitable lorsque l’enfant peut le raconter lui-même à l’évaluateur, mettant en contexte les réussites et les difficultés, démontrant l’intégration de la matière en riant sur une photo et en racontant des anecdotes d’une visite de musée.

Malheureusement, il est parfois utilisé pour tester l’enfant hors contexte en lui demandant de réciter par cœur certains éléments pris au hasard des exemples de travaux de l’année. Si l’évaluateur est à l’écoute de l’enfant, plutôt qu’à l’écoute de sa liste à cocher, il verra la qualité et la somme des apprentissages retenus par l’enfant. Le portfolio peut être un superbe outil, selon son utilisation.

Souvent, il est envoyé par courriel ou par la poste, et l’évaluateur le feuillette sans contexte, sans faire de ce livre de vie un tout qui est en grande partie dans la tête de l’enfant et en petites bribes seulement sur papier. Cela ne rend pas hommage aux beaux apprentissages faits.

Le portfolio demande aussi beaucoup d’investissement de la part du parent. En effet, celui-ci doit documenter les apprentissages de son enfant tout au long de l’année par des photos, des exemples d’activités, des liens avec le programme, etc. pour avoir à la fin de l’année un document suffisamment étoffé pour parler de l’année scolaire de son enfant et prouver qu’il a les acquis nécessaires pour passer au niveau supérieur.

Évaluation par un enseignant

L’évaluation par un enseignant (breveté, qualifié) est un autre choix possible. Le parent prend entente avec l’enseignant, et l’évaluation peut être faite de diverses manières, au gré des participants. Il est possible de présenter un portfolio à cette personne, de lui demander de faire passer des examens à l’enfant ou de regarder la somme des cahiers et travaux faits par l’enfant au cours de l’année. L’évaluation vise à mettre tout le monde à l’aise.

Un enseignant sait habituellement d’instinct les acquis nécessaires pour poursuivre la scolarisation et réussir les niveaux supérieurs. Il arrive à « voir » ce que l’enfant maîtrise et ce qui lui donnera du fil à retordre au niveau suivant. Il peut observer et donner des conseils sur l’orientation future des apprentissages. Il connaît assez bien le programme du ministère pour faire des liens entre celui-ci et les apprentissages de l’enfant faits à la maison.

Certains enseignants ont même déjà fait ou font l’école-maison et ont donc une très bonne lecture des apprentissages en famille. Ils connaissent le mode de vie, le rythme et l’environnement propres à l’école-maison.

L’évaluation par un enseignant est cependant l’option qui engendre des coûts pour le parent. Reste à savoir si le coût de cette option ou le temps de monter un portfolio ou de reconduire fiston à l’école pour les examens sera le poids qui fera pencher la balance.

Un choix personnel

J’ai fait le tour des différents modes d’évaluation possibles et… je crois que vous pouvez facilement deviner mon choix! Je suis trop paresseuse pour monter un portfolio et trop scientifiquement opposée à la formule par examens.

Cependant, toutes ces options sont bonnes, et comme il y a autant d’aventures d’école-maison que de familles qui la pratiquent, je crois que vous devez vous faire votre propre liste des « pour » et des « contre » des options disponibles. N’oubliez surtout pas de lire la page de l’AQED qui explique les différentes possibilités. Peut-être que cela vous amènera une autre lecture des évaluations que ce que je vous présente ici.

Changement du mode d’évaluation

Sachez qu’il est possible de changer le mode d’évaluation que vous avez inscrit dans le projet d’apprentissage en cours d’année. Il faut alors en aviser le ministère.

Il est aussi possible de mentionner votre hésitation entre les choix offerts et d’indiquer au ministère le mode choisi au cours de l’année. L’évaluation n’est qu’à la fin de l’année, donc vous avez le temps de voir votre année défiler avant de vous décider officiellement.

Prochaine leçon, nous aborderons la sacro-sainte SOCIALISATION, puisqu’il faut y venir…

Les opinions exprimées dans cet article n’engagent que leurs auteurs et ne sauraient refléter la position de l’AQED.

Traduit par Nathalie Chapados